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Tracks Aux avant-postes de la culture
Chaque semaine, sur l’antenne comme sur le web, l’émission propose des reportages explorant la culture geek, les musiques actuelles, le cinéma et les formes artistiques émergentes.
Le vendredi, 2 novembre 2012 à 02:15 sur ARTE
Pas de rediffusion
(Allemagne, 2012, 52mn) WDR
A New York, les rappeurs queer Zebra Katz et Mykki Blanco font le ménage dans le hip-hop.
On croirait entendre Atari Teenage Riot et Marilyn Manson en plein délire électro ! En tout cas, Michael Quattlebaum Junior, alias Mykki Blanco, fait le ménage depuis des semaines dans le hip-hop américain. Dans ses chansons, il est tellement question de prostitués mâles, de hauts talons et de gay sex qu’il a maintenant ses entrées dans la presse à grand tirage.
Mykki Blanco
« Les gens flashent tellement sur ces histoires d’homos qu’ils en oublient l’essentiel : si ma musique n’était pas bonne, cela n’intéresserait personne. C’est ça, la différence ! Oui, avant moi, il y a déjà eu des rappeurs gays. Oui, certains étaient bons. Oui, certains étaient mauvais. Mais tous ces nouveaux rappeurs – moi y compris – ont du style. Nous avons du goût. Nous avons une attitude. Nous faisons du bon boulot ! » Michael Quattlebaum junior a des idées bien arrêtées depuis tout jeune : à 16 ans, il quitte le foyer familial pour New York, où il fait la fête dans des bars gays, passe la nuit dans des colocs de drag queens et écrit des poèmes sur toutes ses aventures. Il y a deux ans, il invente son alter ego : Mykki Blanco, une rappeuse ado.
Mykki Blanco
« Mykki Blanco, c’est ma soupape de créativité. J’ai décidé de me montrer parfois en drag queen, parfois non. Il m’arrive tout simplement de ne pas en avoir envie ! Parce que je préfère tourner une vidéo dans la peau de Michael. Pour les gens, c’est le contraste qui fait tout l’intérêt. Je n’ai aucun mal à entrer dans plusieurs costumes. Si j’ai envie d’être un Frankenstein homme, pas de problème ! Itou si je veux être une femme dracula ! Ça excite la curiosité. Faut pas oublier que je suis le roi de l’entertainment ! »
>> Bonus : le premier rap de Mykki Blanco
Confirmation dans les vidéos de Mykki Blanco ! Avec lui, la décadence façon hip-hop n’est plus ce qu’elle était : plutôt que de se pâmer en paillettes devant les nanas, Mykki préfère tenir la pause dans un look hyper sexy. Et, curieusement, dans le monde du hip-hop, il n’est même plus l’exception...
Mykki Blanco
« De toutes façons, le hip-hop est en pleine phase glamour. Il y en a qui font du rap sérieux sur les créateurs de mode, comme Martin Margiela. C’est super intéressant ! On revient aux années 80 : c’est le cirque des vanités ! Un peu comme quand le rock est entré dans sa phase hair metal. Mais bien sûr, le hip-hop reste le hip-hop ! Mais pour l’instant, il traverse une phase très glam. Il y en a même qui appellent les rappeurs ‘fashion gangsters’. » Encore une fois, cette tendance est née dans la capitale des hipsters, New York. A côté de Mykki Blanco, on trouve des rappeurs comme Le1f, Zebra Katz ou Cakes da Killa, qui prouvent que le rap, l’électro dansable et l’underground gay font finalement assez bon ménage. Cela a même donné naissance à une nouvelle tendance, le « rap queer ».
Zebra Katz
« Les journalistes viennent de repérer cela comme nouvelle tendance. En ce moment à New York, on trouve pas mal d’artistes comme ça, en rupture. Je crois que c’est un vrai mouvement. C’est vraiment super que tous ces artistes se fassent connaître. Pourquoi y voir un problème ? »
>> Bonus: Zebra Katz en live
Eh oui, pourquoi ? Et si ça se trouve, cela va encore doper la popularité de Zebra Katz ! Sa chanson « Ima Read » est passée en boucle (11 minutes) au défilé du créateur de mode Rick Owens, après quoi c’est devenu le tube de la Fashion Week à Paris. Même si peu de gens comprennent le sens de « read ».
Zebra Katz
« To read a plusieurs sens. Cela peut vouloir dire lire, analyser, discuter, découvrir. Ici, cela signifie démasquer la personne qu’on a en face de soi, la décoder. La blesser en mettant le doigt sur ses points faibles qu’elle essaye de cacher. Certains appellent cela une ‘attaque verbale’. Ce n’est pas de la violence physique, mais cela peut faire très mal. C’est un terme qui circulait dans les Ballrooms. »
C’est ainsi que des rappeurs comme Mykki Blanco et Zebra Katz sont en train, avec beaucoup de zèle, de révolutionner le hip-hop, dernier bastion macho de la scène musicale. La pop mainstream, elle, a déjà fait son émancipation.
>> Bonus : interview de Mykki Blanco
Mykki Blanco
« On voit toutes ces pop stars femmes qui lorgnent vers le public homo. Qui essayent du moins. Pourquoi pas ? C’est nouveau. Avant, soit elles avaient ce petit quelque chose, soit elles ne l’avaient pas. Ces pop girls qui font de la musique depuis 4 ou 5 ans ignoraient tout du langage gay. Et d’un seul coup, elles disent à tout bout de champ ‘hunty’ et ‘cunty’. Elles reprennent les expressions homo parce qu’elles se sont rendu compte que les gays étaient un réservoir de fans. Des fans qui n’ont pas et n’auront pas d’enfants. Les hétéros, eux vont se calmer un jour et ne payeront plus 40 dollars pour aller au concert. Un fan gay est un fan pour la vie ! C’est ce que vient de comprendre l’industrie musicale. Avec ce public, il y a encore du fric à faire. C’est pas sympa de dire ça ? Effectivement, mais c’est comme ça, c’est la vie ! »
On préfère encore le ‘cunty’ d’origine. Surtout si, en plus, on peut s’éclater dessus !
Bonus : Mykki Blanco en live
Liens :
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